Édito

des autoportraits et des portraits de lieux

 

POUR QUE LA RENCONTRE PRIVILÉGIÉE ENTRE UN LIEU ET UN ARTISTE RÉVÈLE LA POSSIBILITÉ DE PETITS « ENCHANTEMENTS » PAR EFFRACTIONS DANS L'ORDRE DU QUOTIDIEN.

 

Les autoportraits et les portraits de lieux

Des rendez-vous uniques pour vivre une situation inédite ; L’expérience partagée d’une forme sensible, cristallisation d’une suite de gestes en un espace instable et concerté : une danse.

 

La pratique d’autoportrait commence par un journal chorégraphique en vidéo, des petits films super-8 et des polaroids : relevés de figures, de qualités de corps, de mouvements, de lieux : un carnet de notes et de croquis. Elle se développe à travers la création de pièces chorégraphiques intitulées Autoportraits chorégraphiques accompagnés, alternant avec des pièces avec plusieurs interprètes. L’autoportrait est un laboratoire intime où cultiver l’essence du projet à venir avant sa mise en œuvre avec l’ensemble des partenaires. Les créations s’articulent en deux catégories : les autoportraits et les pièces de groupe.
Jusqu’au jour où Laurence Louppe, chercheuse et critique, ébranle cette conception en m’interpellant à propos de Chambre -étapes chorégraphiques en chambres d’hôtel-. Son hypothèse est que Chambre pourrait se lire à travers ma démarche d’autoportrait et même s’inscrire à l’intérieur; que l’apparition du témoin dans le processus de création renforce cette hypothèse.
Sa lecture me renvoie à la manière très empirique dont je travaille avec les artistes associés à mes projets et à cette absolue nécessité d’un temps avec chacun en particulier avant de les réunir. 

Pour exemples :
Lors du SKITE à Lisbonne qui propose à une soixantaine d’artistes de se rencontrer, je prends des rendez-vous individuels d’1h, dans un espace un peu à l’écart, pour réaliser une série de Photomatons.
Pour Les épouvantails -Portraits d’hommes en costumes de fantaisie-, pièce née de mon inscription nouvelle en Picardie, près du Chemin des dames, et de ma découverte de la force de ces paysages, je me déplace pour rencontrer et filmer chaque interprète dans son paysage.
Pour Chambre, le travail s’engage sous forme de face-à-faces dans différents hôtels, générant l’écriture de scénarios par chaque artiste partenaire.
Feuilleton -en épisodes- est composé d’une série de Bande-Annonces qui convient un à deux artistes partenaires dans un lieu de résidence spécifique et s’accompagne de la réalisation d’une bande-annonce film, utilisée pour transmettre des indices des uns aux autres, d’une session à une autre, retardant ainsi au maximum le moment où tous vont se rencontrer. C’est cette première rencontre, mise en jeu directement en public, qui constitue le N°0 de Feuilleton.

 

Aujourd’hui, la pratique de l’autoportrait et sa relation particulière avec un lieu, jouent un rôle central et moteur dans ma démarche artistique. Je constate ce déplacement où les pièces de groupe s’inscrivent  pleinement et consciemment dans le processus d’élaboration des autoportraits comme espaces possibles d’auto-fictions par démultiplication du sujet. Des espaces où mettre à l’épreuve ce que Larys Frogier nomme, à propos d’Autoportrait à la Criée, «la capacité du sujet à s’échanger».

 

++++


se regarder en face
décrire ce qui nous regarde)

 

PUISSE LE FACE À FACE QU'ON PRÉFÈRE CONCERNANT L'AGENT SPACIAL (LE SUPER-BUREAU) AINSI QUE L'AGENT DU BEAU RENDRE VISIBLE LE POSSIBLE DES DÉTAILS SOURIANTS AU DÉTOUR DE LEUR FRACASSANTE APPARITION PARMI CE À QUOI ON S'ATTEND JOUR APRÈS JOUR /


Autant de fois se regarder en face ainsi que décrire ce qui nous regarde
on se retrouve une seule fois et il nous arrive quelque chose qui n’est jamais arrivé :  on ne va pas garder ça pour nous tout seul, ce volume des sens, ça peut très vite passer par le corps, toujours quelque part sans y rester en plus d’être d’accord avec cela = ça se bouge par plaisir /

 

                    traduction de Sabine Macher

 

++++

texteinfos